Je côtoie au quotidien des holdings familiaux à enjeux financiers et émotionnels très importants. Savoir qui détient combien d’actions est le point de départ pour les conseiller.
Je constate l’existence de deux types d’actionnaires majoritaires, (i) ceux qui connaissent parfaitement leurs droits et (ii) ceux qui se font marcher sur les pieds malgré eux. Parce que ces derniers n’occupent pas leur place dans leur propre société. Ils s’autosabotent.
Quand vous êtes actionnaire majoritaire, vous avez deux protections sous-cotées, en pratique, pour défendre les intérêts de la société, et donc les vôtres :
Première protection : la majorité
À tort, certains voient la société comme une démocratie. Alors que c’est une « dictature bienveillante » comme le stipule l’entrepreneuse américaine Coddie Sanchez. Dans une société, une seule ligne de conduite prévaut : la règle de la majorité.
Le vote se fait à chaque fois majorité contre minorité. Ni plus ni moins. Certains actionnaires minoritaires ont tendance à l’oublier et tentent d’influencer sans réel pouvoir votal le résultat.
Quand vous êtes majoritaire, que ce soit à l’assemblée générale, au conseil d’administration ou au conseil de surveillance, c’est vous qui tranchez et personne d’autre.
Sauf s’il y a des règles - rares en pratique - de majorité qualifiée (voire d’unanimité) prévue par les statuts et ou par un pacte d’associés. Dans pareil cas, ça octroie plus de pouvoir à un minoritaire. Toutefois, j’ai vu des dossiers où le majoritaire passe en force en violation de pareilles dispositions soi-disant présentes pour protéger le fondateur minoritaire diluée.
À bon entendeur : « Petit actionnaire minoritaire, petit c*n. Grand actionnaire minoritaire, grand c*n. » disait l’homme d’affaires belge d’envergure internationale Albert Frère.
Deuxième protection : le secret
Si un fonds d’investissement fait des yeux doux à un fondateur majoritaire, c’est au fondateur majoritaire à ne pas se mettre tout à po*l et à ne pas donner - du jour au lendemain - toutes les informations stratégiques sur la boite.
Si un fonds d’investissement pompe la stratégie pour un concurrent dans lequel il a investi et en lequel il croie davantage, le fondateur majoritaire perd tout à terme.
De même, si un minoritaire pose des questions trop détaillées et trop intrusives à une AG, le majoritaire doit invoquer le secret pour ne pas communiquer des informations trop sensibles. À lui de jouer pour sécuriser sa position et son entreprise. C’est contre-intuitif et ça paie.
En clair, la règle n’est pas la transparence en formule « open bar » mais bien l’opacité en fonction de son interlocuteur. La confiance se construit et se confirme au fil du temps.
Trop souvent, certains majoritaires parlent trop, sont trop transparents et se déforcent bêtement. Alors qu’il suffit d’appliquer les règles du jeu pour rester maître chez soi.
Le tout est de trouver la bonne mesure pour éviter de vous voir taxer d’abus de majorité. C’est une question de dosage et d’équilibre. Si vous peinez à trouver la bonne attitude, il est conseillé de consulter un avocat spécialisé pour protéger vos droits, et si nécessaire, exclure le minoritaire qui vous freine.
Vous l’aurez compris. Si vous êtes majoritaire, appliquez les règles du jeu en votre faveur. Le contrôle de votre société, vous garderez.
Qu’est-ce qu’un actionnaire majoritaire ?
Définition :
Un actionnaire majoritaire est une personne physique ou morale qui détient plus de 50 % des actions (1 action = 1 droit de vote) d'une société, lui conférant ainsi une influence décisive sur les décisions prises en assemblée générale.
Trois types d'actionnaires influents :
- Actionnaire de contrôle : celui qui, par sa participation, détient la majorité des droits de vote, lui permettant de contrôler les décisions de la société.
- Actionnaire principal : celui qui possède la plus grande part du capital, sans nécessairement atteindre la majorité absolue, mais exerçant une influence significative.
- Actionnaire de blocage : celui qui a suffisamment droits de vote pour bloquer une augmentation ou réduction de capital. Il a une minorité de blocage. C’est stratégique en sa faveur. En général, il a 25,01 % des droits de vote (à vérifier en fonction du type de sociétés concernées).
Quels sont les droits d’un actionnaire majoritaire ?
- Droit de vote prépondérant : grâce à sa majorité, l'actionnaire majoritaire peut décider en sa faveur lors des assemblées générales, notamment en matière de nomination des administrateurs, approbation des comptes ou modifications statutaires (si le majoritaire détient la majorité qualifiée à cet effet 75 % des droits de vote ou 80% des droits de vote au cas par cas).
- Nomination et révocation des administrateurs dirigeants : il a le pouvoir de nommer ou révoquer les membres du conseil d'administration ou les dirigeants de la société, orientant ainsi la stratégie et la gestion opérationnelle de l'entreprise.
- Approbation des comptes annuels et quitus : chaque année, à l’assemblée générale ordinaire, c’est le majoritaire qui valide – si nécessaire majorité contre minorité – les comptes annuels de l’année clôturée. Ici aussi, le majoritaire octroie ou pas la décharge au conseil d’administration pour la gestion de l’année écoulée.
- Modification des statuts : il peut proposer et faire adopter des modifications statutaires, sous réserve du respect des majorités requises et des droits des actionnaires minoritaires.
- Perception des dividendes : il décide de la distribution des dividendes. Il reçoit, en proportion de sa participation, une part substantielle des bénéfices distribués. Il peut aussi réinvestir tout le bénéfice et ne rien distribuer comme dividendes.
- Accès privilégié à l'information : bien que tous les actionnaires aient droit à l'information synthétisée partagée en assemblée générale, l'actionnaire majoritaire, de par sa position, a un accès plus direct et plus complet aux informations stratégiques et financières de la société. Il a souvent la mainmise sur la relation avec l’expert-comptable et où le commissaire aux comptes.
- Influence sur les orientations stratégiques : sa position lui permet de peser sur les décisions stratégiques majeures, telles que les fusions, acquisitions ou cessions d'actifs importants. Il fixe le cap en assemblée générale.